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Apollo Brown & Ras Kass - Blasphemy (2014)
Apollo Brown et Ras Kas n’auraient pas pu trouver une meilleure introduction que l’extrait du prêtre du ghetto, une vidéo bien connue des nerds de l’internet, qui figure au début de Blasphemy tant le rappeur associé au producteur de Detroit nous livre un sermon tout aussi chargé en swagger accusatrice.
Fidèle à la tradition de Detroit, Apollo Brown perpétue l’influence de Pete Rock mais n’innove en rien pour porter la musique chargée de samples du mythique producteur de New York dans le vingt-et-unième siècle. A peine pitch-t-il les voix des chanteuses de soul qu’il emploie à merveille tout au long de ce disque.
Son talent de producteur se trouve surtout dans son talent de dénicheur de vieilleries capable de porter la bonne parole du boom bap aux oreilles des plus jeunes (H2O, Deliver us from evil). En revanche, ses beats sont des plus efficaces et les bangers sont pléthores avec notamment How to kill god, 48 roses ou Drink irish.
Ras Kas se préoccupe en revanche beaucoup plus du présent et mentionne des thèmes contemporains comme Boko Haram (H2O), le défunt Trayvon Martin ou le bien vivant Donald Sterling (Strawberry), ou malheureusement plus traditionnels comme la prison (Please don’t let me) et l’amour (Too much of a good thing). Avec un flow lent à CL Smooth et des paroles agressives à la Mobb Deep, Ras Kas plaide contre le racisme avec une logique implacable sur Strawberry en déclarant « Brown, black, or white, fuck what haters think cause last time I checked, all pussy is pink ».
On ne retrouve pas que la voix de Ras Kas sur Blasphemy mais aussi des rimeurs aguerris comme Royce Da 5’9’’, Xzibit (pour un refrain efficace sur Giraffe pussy) ou Rakaa Iriscience (Dilated People) et des moins connus (Bishop Lamont, 4Rax) mais c’est le rap du principal interessé que l’on remarque le plus. Autant capable de narrer des histoires simples mais mémorables et de former des refrains tout aussi marquants (How to kill god, Deliver us from evil), il forme avec Apollo Brown un duo rappelant les belles heures de Pete Rock & CL Smooth avec cependant cette touche mélancolique propre au producteur de Detroit, nettement en contraste avec la fraicheur éternelle de The main ingredient.
Digne héritier des années 90, Appolo Brown crée avec Ras Kas l’un de ses meilleurs disques et un album digne du patrimoine du boom bap qu’ils portent tout les deux comme un flambeau à offrir à une nouvelle génération. Joey Bada$$ et Bishop Nehru ne les ont pas attendus mais d’autres viendront enrichir cette esthétique un peu rétro, mais toujours bien vivante, de leurs samples, de leur coups de caisse claire et de leurs commentaires.
25/02/82, 1m80, à peine 60 kilos et élevé pour parcourir le macadam parisien de refuge en refuge jusqu'à son déménagement à Londres. Chroniqueur rock de 2004 à 2010 sur Eklektik-rock puis sur la fille du rock depuis 2010, bibliothécaire 2.0 depuis 2008, passionné de musique (metal, jazz, rap, electro …) et de comics. Ecrit aussi en anglais sur Delay and Distorsion (Chronique musicale). |
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