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Rock Altitude Festival 12-13/08/2016 @ Le Locle, Suisse
Faisant l'impasse sur un jeudi très orienté Pop/Folk, nous voici parés pour un vendredi soir à la programmation prometteuse et un samedi un peu plus en demi-teinte. La fréquentation du festival semble clairement en hausse par rapport à mercredi, et même le soleil (pourtant bien rare dans ces contrées) semble de retour. Des conditions on ne peut plus optimales pour s'houblonner les papilles à coup de Postcore dans les tympans !
Rien n'étant parfait, un problème assez incompréhensible d'accréditations nous empêchera de prendre des photos de la plupart des groupes de ces deux soirs. Vous nous en voyez désolés.
Vendredi
Tesa
La soirée s'ouvre avec Tesa, un groupe letton de Postcore tournant avec Neurosis, l'accroche est donc plutôt prometteuse. Seulement voilà, le concert ne prend pas. Si la qualité du son (rares parties de chant du batteur inaudibles) et l'heure à laquelle joue le groupe (et donc le peu de personnes présentes) n'est pas franchement en leur faveur, la qualité de la prestation reste discutable. Malgré certains riffs bien rentre-dedans, les musiciens semblent plus se croire dans leur local de répét' que sur scène… Des transitions beaucoup trop longues entre les morceaux, quasi aucune interactions avec le public, le constat est malheureusement plutôt amer.
Brutalist
Une Grimbergen plus tard c'est au tour de Brutalist de faire son entrée sur une Tent Stage commençant franchement à se remplir. Projet plutôt mystérieux de plusieurs musiciens issus de la scène Hard suisse (Impure Wilhelmina, Knut), Brutalist était la curiosité de ce vendredi soir. J'ai eu du mal à accrocher aux 5 première minutes, mais après cette légère période d'adaptation mon enthousiasme n'a cessé de croître jusqu'à la fin du concert. 45 minutes de Noise-core complétement barré : les riffs sont ultra-lourds et partent dans tous les sens, mais le public reste très réceptif face à un groupe investi dans une musique clairemement originale. Chers Brutalist, on attend avec impatience une première sortie studio !
Godspeed You ! Black Emperor
Le pari était risqué. Faire jouer Godspeed pour un set d'1h30 à une plage horaire clé d'une soirée fortement orientée Postcore, fallait avoir confiance. Et bordel, chers programmateurs du Rock Altitude Festival, que vous avez eu raison ! Un concert à la progression et à la cohérence dingues laissant l'impression de voir une seule et unique œuvre s'étaler sur toute la durée du set (au milieu duquel sera joué le dernier album en entier). La prestation prouve haut-la-main que le temps accordé était amplement justifié. Les musiciens, aidé par un son impeccable, donneront une prestation toute en retenue, naviguant d'un instrument à l'autre et s'effaçant au profit de leur musique. Alors que les images abstraites défilent sur l'écran géant à l'arrière du groupe, le temps, lui, semble s'être arrêté. Et malgré cette ambiance particulière, un public étonnamment nombreux se tient devant la Main Stage attentif, rendant le tout d'autant plus appréciable et réconfortant.
Mutoid Man
A l'image d'Entombed A.D. le mercredi soir, voici venu le temps du défouloir destructeur de cervicales. Et autant dire qu'entre les très sérieux Godspeed et Neurosis, ça passe merveilleusement bien ! On pourrait qualifier Mutoid Man d'Hardcore'n'Roll teinté de Stoner, mais le projet prend une toute autre ampleur quand on sait qu'il est porté par ni plus ni moins que Ben Koller (batteur de Converge) et Stephen Brodsky (chanteur/guitariste de Cave In). Alors que l'ensemble aurait largement les raisons de se prendre très au sérieux, les messieurs ont plutôt fait dans l'exutoire complétement déjanté. Et c'est tant mieux ! Ça commence par une courte reprise de "Purple Rain" sous speed, et ça enchaine avec près d'une heure de titres plus efficaces les uns que les autres ("Bridgeburner", "Scavengers", "Beast"), le tout avec des musiciens ne cessant de se faire des doigts entre eux et avec un public aux anges. La technique des trois bonhommes est impeccable (les fûts de Ben Koller ont pris tellement cher), et avec deux très bons albums et des prestations live de cet acabit, Mutoïd Man est définitivement entré dans la cour des grands !
Neurosis
Nous y voilà, le clou triple épaisseur du festival. Neurosis pour l'unique date suisse de sa tournée 30ème anniversaire. Inutile de préciser que l'évènement était méchamment attendu, comme en témoigne la foule à t-shirts Sea Sheperd et vestes à patch Neurosis qui s'agglutine joyeusement devant la Main Stage. C'était mon premier concert de Neurosis, et connaissant très basiquement la discographie du groupe (principalement "Trough Silver in Blood", "Time of Grace" et "Honor found in Decay") je suis piètre juge. Mais l'ouragan sonore que je me suis pris dans le coin de la gueule ce soir, lui, reste mémorable. Tout dégage une puissance inouïe, de la manière qu'ont les musiciens de s'approprier la scène à l'énergie et la rigueur qu'ils mettent dans leur façon de jouer. Les voix de Kelly et Von Till sonnent à merveille, et un son excellent sous la Main Stage leur rendra tout honneur durant les 1h15 du set. Tout le monde semble sortir lessivé mais néanmoins comblé d'un des concerts les éprouvants et gratifiants du festival.
P.S : Ayant elle bien plus de concerts de Neurosis à son actif, Estelle (alors injustement privée de photo-pit…) me confirme que nous avons bien eu affaire à un des très bons concerts du groupe !
Samedi
Them Stones
Après une nuit matinée de sommeil bien méritée, on retourne gentiment vers la patinoire du Locle pour la dernière soirée de ce Rock Altitude Festival 11ème du nom. C'est au groupe local Them Stones que revient l'honneur d'ouvrir la marche sur la Main Stage, et les bougres se sont plutôt bien débrouillés. Alors qu'au prime abord je m'attendais à un énième groupe de Heavy-Rock teinté de Stoner, la musique qui en ressort est au final bien plus proche d'un Grunge "Seattlien" des 90s. Une sorte d'Alice in Chains aux accents désertiques. Malgré quelques passages instrumentaux très typés Stoner qui détonnent du reste, le tout est pas diablement original et propices aux expérimentations, mais force est de constater que ça reste très efficace. Le chanteur communique bien avec le public (en même temps il est un peu chez lui dans cette patinoire ;) ), et le tout contiendra tous les ingrédients d'un bon concert d'ouverture !
Emilie Zoé
On continue avec les groupes locaux, puisque c'est maintenant au tour d'Emilie Zoé d'entrer sous la Tent Stage avec son batteur. J'ai bien aimé "Dead-End Tape", le premier album qu'elle a récemment sorti chez nos chouchous d'Hummus Records, mais j'étais plutôt dubitatif quant à son rendu en live. Au final, appréhensions balayées, puisque je suis resté devant la scène durant toute la durée du set passant un très agréable moment. Le son est étonnamment consistant pour un duo guitare/batterie, et le sens de la mélodie d'Emilie (autant au niveau des riffs que de la voix) force le respect. Le personnage dégage une grosse sincérité et beaucoup de sympathie, on a l'impression de se trouver en face d'un Kurt Cobain féminin (à l'accent neuchâtelois) dans sa manière de s'accrocher à sa guitare et de communiquer avec le public. Impression renforcée par une set-list alternant allégrement entre morceaux bien nerveux et compositions plus calmes et intimistes. Une toute bonne prestation, et encourageante pour la suite du duo en vue des très bons nouveaux morceaux dévoilés !
Vient l'heure de retrouver l'équipe afin de remplir les panses et désaltérer les gosiers ! Une pause qui se fera au son de Stuck In The Sound et d'Erik Truffaz Quartet & [insérez ici featurings à rallonge], deux groupes qui ne nous ont pas emballés du tout, et c'est peu dire. Vu la foule qui a pris son repas pendant la prestation Jazz/Trip-Hop/Rap/Bruit-de-trompettes-agaçants d'Erik Truffaz on se rassure en voyant que l'on n'est pas les seuls à ne pas accrocher au délire. Tant pis, il y a un public pour tout.
Chelsea Wolfe
Du public il y en aura d'ailleurs un sacré paquet sous la Tent Stage pour accueillir le phénomène Chelsea Wolfe, concert très attendu de la soirée. Malheureusement dans ce même public on aura droit à quelques rares éléments perturbateurs. De ceux qui sifflent avant la fin des morceaux aux bourrés qui gueulent de la merde à 140dbs et déclarent leur amour à la chanteuse, une légère envie d'étranglements compulsifs se fera ressentir. Bref. Une fois ces légers désagréments oubliés, le concert était génial. Chelsea semble possédée sur scène, ses musiciens débordent d'énergie (mention pour la batteuse !), et le tout s'en ressent dans la musique qui, avec un son de guitare très saturé, sonne bien plus "metal" que ce que laisse présager les albums. Beaucoup de morceaux de l'excellent "Abyss", sans oublier les incontournables "Feral Love" et "House of Metal" donneront une heure d'un set intense parfaitement exécuté. Rien à redire, sans doute l'un des meilleurs concerts du festival.
Mono
Direction la Main Stage pour ne rien rater du set des surdoués Mono. C'est mon premier concert du groupe, et la fascination n'en sera que plus grande. A l'image de Godspeed le soir précédent, les Japonais semblent réellement vivre avec leur musique : la progression et les transitions des morceaux sont parfaites et il en ressort un sentiment d'harmonie euphorisant. Les mélodies perdent rarement de leur intensité, et même si c'est très à fleur de peau, force est de constater que ça prend réellement aux tripes. Une expérience assez bouleversante pour peu que l'on y soit sensible. Le tout sera aidé par un son tout bonnement excellent, et un travail sur les lumières sublimant vraiment la prestation. Même si on peut reprocher que chaque morceau est un peu ficelé de la même manière (un début entêtant et minimaliste menant gentiment à une fin explosive), la magie prend, encore et encore. De plus les quatre musiciens resteront très humbles, ne se mettant jamais en avant, laissant parler avant tout leur musique plutôt que leur image (et ce n'est de loin pas donné à tous malheureusement). Après un final grandiose, le quatuor partira en remerciant chaleureusement un public les acclamant à tue-tête. Un grand moment.
Ansi s'achève ce 11ème Rock Altitude Festival, sur une note plus que positive, rappelant encore une fois que l'attente sera longue jusqu'à l'année prochaine. On se console, rassasié pour un temps par l'excellente programmation proposée lors de cette édition, et on laisse gentiment le Locle à sa morosité post-festival. Encore un grand merci à l'équipe du festival, et à dans un an, même heure même endroit !
Élément suisse de la rédaction, j'adore écouter de la musique de bourrin entre deux évasions fiscales. |
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