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Roadburn 2013 : journal de bord jour 01 - L'art avant tout
18 avril : une fois encore, Tilburg et son Roadburn Festival nous appelaient, telle une Banshee appelant un mélomane sur le point de décéder par manque de fraîcheur musicale. Oui, l'équipe derrière ce festival désormais reconnu comme étant un des plus pointus et éclectiques de son non-genre nous a une fois de plus concocté une édition aux petits oignons aux styles variés, passant du post-metal au kraut-rock, du rock psyché à la musique industrielle, et j'en passe évidemment, afin que nous puissions nous remplir la tête de nouveaux projets, horizons et souvenirs jusqu'à ce que tout recommence.
Comme tous les Roadburn que nous avons fait jusqu'à présent, tout démarre très tôt et à Paris. On rejoint un pote, on paquette la voiture et on roule jusqu'à apercevoir les premières traces de la signalétique roadburnienne qui innonde Tilburg depuis 2 ans désormais (oui, seulement). Notons au passage que le travail graphique autour du Roadburn 2013 est signé par l'illustrateur Costin Chioreanu qui présentait d'ailleurs déjà ses magnifiques oeuvres lors de l'édition 2012.
Pour l'équipe le doute n'était pas permis en ce début de festival, nous avons unanimement choisi d’aller voir The Black Heart Rebellion défendre son nouvel album que nous avions présenté ici-même dès sa publication : Har Nevo. Le petit plaisir, en plus de retrouver un groupe qu'on a hâte de découvrir en live, c'est qu'il passe aussi accessoirement dans une des plus belles salles du festival soit le Het Patronaat, une immense pièce à l'arrière de l'église Saint-Joseph de Tilburg avec ses vitraux, son architecture magnifique et surtout des conditions (son, proximité...) parfaites. À l'arrivée la scène est inondée de matos. Un set de percus en plus de la batterie est présent sur la droite de la scène, du même côté on trouve un banjo et une basse, de l'autre un guitariste et un claviériste lui aussi muni d'une basse. Orgie instrumentale en vue. Après un premier morceau, le groupe met tout le monde d'accord : cohérent sur scène, terriblement carré et restituant bien l'ambiance envoûtante et surtout la force des morceaux d'Har Nevo dont ils joueront principalement les morceaux. C'est une claque bien sèche qu'on se prend dans les gencives pour entamer le fest. Plus c'est bon, moins c'est long, le temps file et nous abandonnons l'excellente prestation de TBHR car au Roadburn Festival, la triste réalité est que voir un set en entier veut dire en louper potentiellement un autre qui vous intéresse, et ce, intégralement.
On file donc direction la Stage 01 du 013, vaisseau mère du festival, qui accueille les Français originaires de la ville de Colmar : C R O W N. Autant dire que depuis quelques mois ce qui arrive au duo est assez cool, après un gigantesque premier album que nous avions chroniqué ici intitulé "The One", le groupe vient tout juste de publier "Psychurgy" via Candlelight Records et assurera la première partie du passage de Godflesh en France... et ils étaient programmés au Roadburn oui, excusez du peu. Ayant vu pas mal de groupes dans cette petite salle du 013 par le passé (dont beaucoup que j'avais très envie de découvrir en conditions live), j'avais une petite appréhension, car souvent, sans être un massacre, le son n'était pas à la hauteur de la qualité des projets. Je regarde le duo faire ses balances avec soin, un laptop en guise de batteur et 16 cordes s'accordant au service de la pesanteur, doux euphémisme. Le set démarre et le son n'est pas parfait, il semble y avoir quelques petits réglages à faire, mais après quelques morceaux, la pression physique dans la salle augmente et nous fait indéniablement plier sous le poids des compositions machinales du groupe, dont certaines, nouvelles, m'échapperont dans leurs "raffinements" mais emporteront quand même ma nuque durant de longues minutes. Ma première envie en quittant le show ? Récupérer Psychurgy pour découvrir les compositions que je viens d'entendre en version studio.
Souvent au Roadburn, les meilleures choses viennent des tentations aléatoires. N'ayant pas grand chose qui nous bottait on s'est dit “tiens, pourquoi ne pas tester Penance ?”, ce groupe de doom né des cendres de Dream Death et qui d'après le chanteur avant le show, n'avait pas joué ensemble depuis le début des années 1990. Et bien ça se sentait. Mon dieu que c'était mou. La grandeur de la main stage n'aidant pas, le groupe suscitait un ennui profond à mon cerveau déjà bien embué. Je veux bien croire que le groupe possède dans sa discographie des albums cultes du style en question, mais là non, ça ne l'était certainement que pour les amateurs du groupe.
Le temps de casser la croûte et on fonce voir le duo originaire de Bruxelles : Magdalena Solis. Au programme psyche, psyche et psyche. De chaque côté de la petite scène de la stage01 se tiennent les membres, à gauche un synthé, à droite pareil mais avec une guitare. Des projections vintage bien foutues (le projet étant né à la base autour de la création d'un film) sur des nappes et des constructions qui, même si elles s'avéreront parfois un peu déroutantes dans leurs courtes durées, nous happeront efficacement dans un univers qui va à merveille avec le concept curateur de l'édition 2013 : The Electric Acid Orgy. Une prestation à vous foutre en sommeil paradoxal, suivi d'une légère petite gaule.
Toujours "on the run", nous filons prendre de bonnes places pour être présents au premier des 2 shows de High on Fire. Le premier sera l'occasion pour le groupe de jouer intégralement son premier album "The Art of Self Defense" (paru en 2000). Une bonne heure de cassage de gueule en perspective, même s’il ne fait pas partie de mes albums favoris du groupe, avec un son sur scène beaucoup plus agréable que pour leur seconde prestation (mais ça nous en reparlons). Comme à son habitude, le groupe a livré la marchandise avec force, Matt Pike étant visiblement beaucoup plus alerte que lors de ses prestations avec Sleep l'année dernière et avec un Des Kensel impressionnant battant la mesure avec une vigueur constante. Respect.
Le premier drame du festival, c'est maintenant. Nous quittons High On Fire plus tôt, histoire d'avoir 20 minutes d'avance pour nous placer à Maserati qui joue dans la Green Room... qui est déjà pleine à craquer. Et quand je dis pleine à craquer, c'est genre des gens qui sortent de la salle mais qui sont toujours les yeux rivés sur la scène. MEH. Si il y avait vraiment un projet que j'aurais voulu voir en live, c’était celui-ci.
Après quelques essais d’insertion à travers la foule on improvise et on se jette à l’exposition John Baizley à la maison de l’art contemporain de Tilburg dans une rue parallèle au 013. Arrivé sur place une dame tirée à quatre épingles nous accueille comme étant les derniers avant la fermeture, puis nous propose avec gentillesse une bière. On fait le tour, on découvre pieusement les croquis et les différentes étapes du travail de John Dyer Baizley l’illustrateur, avec émerveillement. Les détails de son travail, ses idées ont fait de lui un artiste de référence dans le milieu. Nous découvrons aussi avec étonnement à combien se vendent ses oeuvres, parfois avec 4 zéros dans le prix. Cela pourrait être le début d’une tout autre discussion, certes intéressante, mais nous quittons rapidement les lieux pour participer justement à la fin de la prestation de John Baizley qui n'est visiblement plus qu'avec Katie Jones sur scène dans un Het Patronaat bien plein.
Baizley fait entre 2 morceaux quelques déclarations, en particulier sur le fait qu'il est content d'être ici après le dramatique accident de bus de l'année dernière qui a bien failli leur coûter la vie, sur le fait de jouer ici, au Roadburn Festival, puis enchaîne sur une version magnifique d'Eula appuyée au violon par Katie Jones qui clôturera le set avec force et émotions.
Malgré mon envie d'aller voir la crasse et la violence de Lord Mantis en Stage01 qui m'avait retourné avec leur album Pervertor en 2012, je décide de finalement rester au Het Patronaat pour tenter Intronaut en live, que j'ai définitivement beaucoup de mal à encaisser sur album. Mais je ne suis pas du genre à abandonner si facilement.
Le groupe s’installe donc sur scène à 22h00 pétantes, de manière symétrique : un guitariste chanteur de chaque côté, un bassiste au milieu et la batterie derrière lui. J'espère dans mon coin que cette rigueur de placement, rappelant légèrement un côté trop prog pour moi sur album, ne viendra pas entacher l'expérience live. Et dès le début du set, toutes ces idées partent en fumée. Ces mecs maîtrisent absolument et sans être dans la démonstration dégoulinante, ils vous propulsent dans des structures rythmiques folles qui vous retournent la gueule en quelques secondes. Le bassiste semble en chier des briques à suivre la cadence mais y arrive avec succès, véritable colonne vertébrale du projet avec son ami aux fûts, les 2 guitaristes déployant les ailes du groupe de chaque côté avec des harmonies folles, et des voix parsemées, absolument bien incorporées. Bon. Moi et mes préjugés nous sentons tout petits face à ce mastodonte à qui, pour le coup, je dois absolument un nouvel essai sur album prochainement, certainement en commençant par leur tout dernier album "Habitual Levitations".
Complètement lessivé par la prestation des Californiens, je décide d'aller terminer la journée devant The Psychedelic Warlords, qui propose de revivre l'album "Space Ritual" d’Hawkwind en intégralité à l'occasion de son 40ème anniversaire. Perso, Hawkwind, j’aime, j'y allais donc les yeux fermés. Le groupe occupe de gauche à droite la main stage du 013 avec un saxophoniste, un guitariste, un chanteur, un bassiste (qui imitera assez ridiculement la manière de jouer de Lemmy affublé d'un chapeau de cowboy) ainsi qu'un mec balançant tous les sons spaciaux de l'album avec du matos que j'ai du mal à identifier au loin. Ce que j'arrive parfaitement à identifier, c'est la peine avec laquelle le groupe arrive à assurer les compositions du groupe original. C'est mou, le chanteur en fait des caisses sans arriver à persuader, le saxophoniste est complètement inaudible à l'assistance, seule la basse, la gratte et les sons expérimentaux arrivent à nous sauver du naufrage. Les compositions se jouaient à l’époque lorsque chaque membre avait pris une drogue différente, ce qui ne semble absolument pas le cas des musiciens ce soir. L'impression de voir un mauvais cover band est totale, et l'ennui aussi, appuyant la fatigue. Cette première soirée s'achèvera donc ici.
Retour nocturne au bungalow pour moi et mes acouphènes suivi d'une dernière bière avec une tartine de beurre de cacahuète, aussi saturée en gras que ce qui s'annonce demain avec des groupes comme Kadavar, Uncle Acid, Electric Wizard, Goat ou Amenra. Mais ça, c'est demain.
Crédits photos : Andrey Kalinovsky / CSAOH.com
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