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Drone Activity In Progress - Red Bull Music Academy, 30/09/2016 @ Montréal
L'académie Redbull, qui se promène un peu partout dans le monde, avec son budget quasi Infini, et sa myriade d'artistes tous plus différents et éclectiques les uns que les autres, est venue s'installer à Montréal pour une partie des mois de septembre et d'octobre. Avec des têtes d'affiche comme Iggy Pop et un set D.J de Björk, différentes facettes de la musique moderne y sont très bien représentées. Dans le cas qui nous intéresse : la soirée drone/ ambiante et metal "drone in progress" avec un contingent d'artistes canadiens tous réunis dans une usine désaffectée de Griffintown, dans le sud-ouest de la métropole. Une soirée unique et toute en basse fréquence avec des artistes de renom tels que Tim Hecker, Venetian Snares, Stephen O'Malley, thisquietarmy et plusieurs autres.
L'endroit était spectaculaire, une mega-usine vide et réaménagée en salle de spectacle double, qui autrement, à ce qu'on m'a dit, en temps normal sert plutôt de plateau de tournage, Des stroboscopes à l'infini, plusieurs ventilateurs géants, et un système de son plus qu'impressionnant. Des longs corridors sombres faits de briques couverts de rideaux noirs, des machines à fumée qui donnaient un aire fantomatique et lesdits stroboscopes aidaient à créer une ambiance oppressante et glauque, tout comme la musique qu'on allait nous servir.
J'étais parmi les premiers arrivés vers les 8 heures, et malgré le fait qu'à moi tout seul je n'arrivais jamais à tout couvrir l'impressionnant éventail d'artistes présents, j'ai quand même réussi à voir beaucoup de performances, tous plus éclectiques et différentes malgré le thème rassembleur et général du drone.
J'ai manqué le debut de la performance d'Echo Beach, mais j'ai quand même réussi à en voir une bonne partie, la demoiselle nous a servi un drone calme et relaxe, ponctué de bruitages et de pulsations électro-acoustiques. La foule qui n'était pas encore nombreuse dans la salle numéro 1 était majoritairement assise ou couchée par terre, un thème qui se répétera plusieurs fois durant la soirée. Somme toute j'ai bien apprécié la performance même si je n'étais pas familier avec sa musique, qui me rappelait une mer tranquille vue de la plage, ce fut une belle entrée en la matière d'une soirée qui se promettait d'être un assaut sur les sens.
Ce fut ensuite le tour, sur la même scène, de Drainolith qui lui, a préféré une approche "spoken word" accompagné de passages sonores de type " arsh noise" accompagnant une histoire orale sur les Hell's Angels canadiens, plus précisément le chapitre sanglant et meurtrier de Montréal et du Québec, et la guerre sans merci qu'ils se sont livrés avec leurs ennemis jurés, les Rock Machines. C'était bien, mais sans plus, j'aurais préféré définitivement plus de passages sonores que des passages parlés, mais j'ai quand même bien aimé la performance pour son choix de sujet original, et la foule qui commençait à se faire plus nombreuse aussi.
Ensuite, d'un pas rapide vers la salle 2 où avait déjà commencé Frédérick Maheux, et son "set" de "power électronique" qui lui, faisait dans l'extrêmement bruyant, des paroles criées et couvertes de distorsion, une musique endiablée et un rythme industriel très chaotique, qui à un moment donné, comprenait même un "grinder", flammèches comprises. Somme toute une expérience déconcertante et originale, lui qui s'était installé à même le sol de la salle, avec sa table remplie de différents bidules et pédales à effets électroniques, qu'il manipulait avec aplomb et dextérité. Une très belle surprise pour moi qui n'étais pas trop familier avec le répertoire de Maheux.
Ce fut ensuite le tour de Neige et Noirceur dans la salle numéro 2, et après le chaos de Frédérick Maheux, le trio capuchonné de black métal ambiant était un retour vers le calme, avec claviers riches, lourds et langoureux, et ce malgré une légère baisse de volume, peut-être dûe à mes bouchons que j'avais bien enfoncés dans mes oreilles durant le spectacle précédent. Tout était sombre, froid et glauque, avec très peu de variation dans les drones de base, sur lesquels ils battirent le reste de leur performance, ils semblent y avoir eu quelques problèmes techniques au niveau de la voix qui se fit discrète comme si on avait tout simplement oublié d'allumer le micro, ou comme s'il était éteint ! Durant le spectacle, des percussions lentes et rythmées se glissaient ça et là, tel le cœur battant d'un vampire revenu à la vie après une hibernation sous la neige d'un trop long hiver. Le tout était dénué d'émotions, lent et glauque. Il portent très bien leur nom ces Neige et noirceur.
Je suis ensuite resté dans la salle numéro 2 avec beaucoup d'excitation, puisque que c'était au tour de Michel Langevin alias Away, le légendaire batteur du tout aussi légendaire groupe canadien Voïvod, de nous servir une prestation solo à la batterie. Et quelle prestation ce fut! Le son était impeccable et fort, les "bass drum" était tellement puissantes que mes narines en vibraient. On a aussi compris pourquoi Away est un musicien légendaire : parce que c'est avec expertise et enthousiasme qu'il nous a servi un bon 30 minutes de solo endiablé, très tribal et lourd, les doubles bass drum se faisait aller allègrement avec vitesse et justesse, passant de baguettes standard à des maillets, sans jamais manquer un coup. Magistral, tout simplement. Par après j'ai appris que le tout était improvisé et franchement ça ne paraissait pas du tout, au contraire, c'était tellement droit que, du moins dans ma tête, ça ne pouvait être autrement qu'une prestation bien établie et pratiquée d'avance. Apparemment non. La marque d'un grand batteur. Ce fut l'un des moments forts de la soirée.
Je me suis rapidement dirigé vers la salle principale où thisquietarmy avait déjà entamé sa prestation, la salle qui commençait vraiment à être remplie baignait dans une lumière rouge et s'emplissait de fumée, Eric Quach nous a servi une performance extrêmement lourde en basse fréquence, la scène où il se produisait était équipée de plusieurs enceintes et de sub-woffer, un son très clair et riche en émanait qui nous enveloppait telle une couverture chaude. Il puisa dans son énorme discographie, sortit quelques vieux titres mais surtout ses plus récents albums, et réussit à capter l'attention de tous dans la salle. C'est complètement fou ce qu'il arrive à faire avec une seule guitare et une boîte à rythme ! Les boucles de drones s'empilaient les unes sur les autres et des texture de synthétiseurs se mêlaient aux lignes de guitares, produites par son éventail énorme de pédales à effets., le tout restait extrêmement cohérent et des mains moins agiles aurait pu facilement s'y perdre. Il passe plusieurs mois par année en tournée en Europe et ailleurs dans le monde, il a donc une énorme expérience de la scène, et est devenu maître dans l'art sombre du drone, et est définitivement l'un des meilleurs dans son créneau. Un autre moment très fort de la soirée.
Une petite pause s'imposait ensuite et j'ai malheureusement manqué Kara-Lis Coverdale, Âmes Sanglantes et Mélanie Mongon et Topon Das de Fuck The Facts, j'avais besoin de reprendre un peu mon souffle suite à ce début de marathon de musique oppressante.
Je suis retourné à l'intérieur à temps pour voir et écouter Stephen O'Malley, Le musicien de Seattle, qui réside désormais à Paris, membre (entre autres) des géants du drone Sunn 0))), qui était un ajout de dernière minute, lui qui a remplacé à pied levé Black Mecha qui a dû annuler sa performance deux jours avant la prestation, la soirée qui promettait d'être lourde a tout d'un coup définitivement pris un tournant vers le Metal. Un énorme mur d'amplificateur dernière lui, guitare en main, et pédales de distorsion à ses pieds, c'est vers minuit moins le quart qu'il se lança tête la première dans une performance lourde, dissonante et suffocante. Cependant, il sembla éprouver une myriade de problèmes d'ordre technique, les amplificateurs qui n'en faisaient qu'à leur tête, à un moment donné on a même pu l'apercevoir prendre un des trépieds de microphones d'un des amplificateurs et le lancer derrière la scène. Même si ce fut une performance honorable et qu'il a continué un bon moment malgré les problèmes qui persistaient, après environ 25-30 minutes, O'Malley a tout simplement fermé les amplis et quitté la scène l'air rageur. Dommage, ça commençait à être lourd. j'avais adoré sa performance à la Salla Rossa il y a 2 ans et j'étais très heureux de voir qu'il avait été rajouté à la soirée. Malgré les problèmes, ce fut somme toute une bonne prestation. Étant un très gros fan de Soma et de Sunn 0))) j'étais quand même conquis par la lourdeur des tonalités de la guitare dont lui seul a le secret. Même si ce n'était pas comparable à l'assaut de Sunn au début de l'été.
Vers une heure moins le quart le savant fou du break core, le Manitobain Aaron Funk mieux connu sous le nom de Venetian Snares est monté sur la scène principale pour commencer une performance complètement endiablée et déjantée. Il avait promis de nous détruire les oreilles et de nous servir "6 millions de mini drones à la vitesse de la lumière" et c'est exactement ce qu'il a fait. Rarement dans ma vie j'ai assisté à un spectacle semblable, c'était un assaut sur les sens, autant pour les yeux et pour les oreilles, et certainement pas pour les gens qui souffrent d'épilepsie, les stroboscopes semblaient complètement déréglés à essayer de suivre l'impossible musique de Venetian Snares, tous ceux qui commençaient à s'endormir vue l'heure tardive furent complètement réveillé et au choix, furent totalement conquis ou prirent leurs jambes à leur cou en direction de la sortie. Le son était massif, l'ambiance folle, avec plusieurs regards de gens qui ne semblaient plus être capables d'assimiler la folie musicale electro-grind. La salle était pleine et Funk nous a servi une prestation magistrale, digne de la réputation qui le précède, soit celle d'un assassin du son, et magicien du synthétiseur modulaire. Complètement fou. Ce fut une épreuve totale, et à la fin les courageux qui étaient resté jusqu'au dernier moment sortaient d'un air vainqueur comme s'ils avaient réussi à survivre à quelque chose d'impossible à vaincre. Définitivement, le moment fort de la soirée et dans mon cas un des meilleurs spectacles que j'ai pu voir dans ma vie. J'étais déjà fan du Manitobain, mais j'en suis ressorti totalement conquis et surtout annihilé.
Ensuite c'était la prestation finale de la soirée, avec Tim Hecker dont la musique allait jouer dans les deux salles en simultané, mais malheureusement pour moi, et surtout vue l'heure extrêmement tardive, le fait que Venetian Snares avait détruit le peu de volonté qui me restait couplé au devoir de parent de jeunes enfants qui m'attendait tôt le lendemain matin (même si nous étions déjà rendus au lendemain) je suis allé dire au revoir aux amis qui étaient présents et je me suis tranquillement dirigé vers la maison, complètement ébranlé et vide de toute énergie, assommé par le coup de grâce que Venetian Snares venait de m'assener mais totalement conquis par cette soirée folle.
Crédits photos : Baktelraalis
Batteur pour Nous Étions et Argument, bassiste pour Valeri Fabrikant et The Band Of Peace, père de famille, maniaque de musique en tout genre. |
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