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La Dispute + Former Thieves + Sugartown Cabaret 23/01/12 @ la Boule Noire, Paris
Arrivé à La Boule Noire à 19 h 30, à peine ai-je le temps de m'installer que des éléments me paraissent anormaux. Tout d'abord, le public. Ici point de barbes et de carrures d'ours, les moustaches de hipsters couplés aux jeans slim et aux mèches de travers semblent en revanche être de rigueur. La musique qui joue dans la salle est aussi loin de ce que j'ai l'habitude d'entendre, me faisant penser à du Blink-182 (oui, encore eux), mais avec des breakdowns en plus. Pas de doute possible, je suis bien au bon endroit.
En effet, ce soir je fais un léger écart par rapport à la ligne éditoriale habituelle de Pelecanus pour vous parler d'un de mes grands coups de cœur de l'année: La Dispute. Car même si ce groupe n'apparaît pas dans mon top 2011 (faute à un dernier album un peu quelconque), je me suis pris d'une grande affection pour ces petits jeunes du Michigan surfant sur une nouvelle vague de screamo/post-hardcore (aussi appelé "hardcore-pour-les-gens-qui-n'aiment-pas-le-hardcore" par des mauvaises langues). Et pourtant, le pari n'était pas gagné d'avance, puisque comme à peu près tous ceux que je connais, ma première réaction à l'écoute de leur musique fut "il est sérieux leur chanteur ?". Sûrement l’élément qui se démarque le plus, la voix de Jordan Dreyer sonne comme... comme un ado qui mue, en fait. C'est donc une voix aiguë, très jeune, qui se brise sans arrêt alors qu'il hurle ses paroles à un rythme effréné. Mais lorsqu'une fois passé le choc de la première écoute, on arrive à faire abstraction de cette voix, on découvre des instruments d'une précision et subtilité étonnantes, qui alternent entre douces mélodies à peine audibles et gros riffs qui tachent. On continue donc à écouter, et vient ensuite le choc des paroles. Ces dernières, très personnelles et extrêmement bien tournées, donnent finalement un sens à cette voix, en y ajoutant un côté "désespéré". Et là, on se dit que c'est vachement cool quand même, et qu'on aimerait bien voir ce que ça donne en live.
Mais je m'égare un peu. Car avant, nous avons droit à deux autres groupes, dont les français Sugartown Cabaret qui entament les hostilités un petit quart d'heure après l'ouverture des portes. Et je n'accroche pas. Les guitares ont un son d'enfer, la prestation est plutôt propre, mais le tout est à mon goût gâché par une voix aiguë et relativement monotone, d'autant plus qu'elle est noyée dans du delay au point de ne rien pouvoir discerner. Pourtant, vers le troisième morceau, alors que j'étais en train de chercher des vannes sur les chorégraphies du chanteur, j'ai bien failli changer d'avis sur ce groupe, et ce, grâce à un magnifique passage instrumental tout en puissance et headbangs. Mais une fois ce morceau fini, le groupe est malheureusement reparti sur un terrain plus connu, et j'ai re-décroché.
Vient ensuite le tour de Former Thieves, un groupe signé sur le même label que La Dispute, et nous avons ici droit à quelque chose de plus énergique. Le set est très efficace, notamment grâce à la présence scénique du chanteur, mais, même si le public semble plutôt emballé, je ne trouve pas que le groupe ajoute quoi que ce soit au genre, et ai presque du mal à différencier les morceaux entre eux. Ce set, d'une durée avoisinant les cinquante minutes, me laissera donc complètement indifférent.
Et enfin, après un soundcheck quasi-inexistant, les mecs de La Dispute prennent place sur scène. N'ayant pas vu beaucoup de photos des musiciens je suis surpris par leur jeune âge et me demande longuement s'il ne s'agit pas de roadies, jusqu'au moment où la lumière s'éteint et le show commence. Je me force tout de suite à étouffer un rire, car en plus d'avoir des bonnes têtes à claques (vrai pour au moins une partie du groupe), les gars se lancent tous dans des danses plus ridicules les unes que les autres. Mais ce détail devient sans importance lorsque résonne le premier couplet de A Departure, car il faut admettre que ça envoie du lourd. Le son est parfaitement maîtrisé, toutes les nuances de volume se retrouvent dans la prestation, et la voix a un rendu vraiment similaire aux enregistrements studio.
Cependant, et là ça devient très subjectif, la setlist a été ma grosse déception de la soirée. Vous vous souvenez, quelques paragraphes plus haut j'ai parlé d'un dernier album un peu quelconque ? Et bien, même si l'on pouvait s'y attendre, la setlist est en quasi-totalité composée de morceaux de ce dernier album. Et, alors qu'à mon goût, Somewhere at the bottom of the river between Vega and Altair (un nom d'album digne d'un bon groupe de post-rock, ça) contient uniquement des petites perles avec des passages bien accrocheurs dans chaque morceau, avec Wildlife le groupe a pris beaucoup moins de risques au niveau des mélodies, des rythmes, des paroles (plus génériques, moins personnelles et poignantes), ce qui résulte donc en un album plutôt conventionnel. De plus, King Park, qui est pour moi le meilleur morceau de l'album, n'a pas été joué ce soir, au profit de chansons telles que The Most Beautiful Bitter Fruit, Harder Harmonies, A Letter, ou encore Edward Benz, 27 Times.
C'est donc avec une joie non dissimulée que j'accueille New Storms for Old Lovers, avec sa pêche et ses riffs d'enfer. Le public, dont les premiers rangs connaissaient pourtant toutes les paroles du dernier album (et il y en a pas mal, croyez-moi), a l'air tout aussi enthousiaste que moi, et c'est donc pendant les morceaux du premier album (comme Sad Prayers for Guilty Bodies et son magnifique final) que la salle est le plus agitée: ça bouge, ça danse, ça s'éclate. Un troisième morceau de cet album, Said the King to the River, sera joué à la fin du rappel, faisant par ailleurs une bonne démonstration du niveau technique des musiciens. Les guitares s’échangent des riffs bien rythmés, le batteur est toujours aussi régulier et précis, bref techniquement c'est un sans faute. Le groupe finira donc la soirée par une série de remerciements, avant de disparaître, dans un tonnerre d'applaudissements.
Bref, un excellent show pour les fans du dernier album, et juste bon pour les autres (même si certains passages frôlaient l'extase).
J'aime les ours, le whisky et les internets. |
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