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Claire Bernadet : chroniqueuse / booker / relations presse
Ça faisait longtemps tiens ! Ajoutons donc un nouveau portrait dans notre galerie avec Claire que j'ai croisé pour la première fois dans les méandres des internets et de son site The Heavy Chronicles. Comme vous vous en doutez Claire n'est pas que chroniqueuse sur le Web, elle est aussi bookeuse et relations presse du côté de Bordeaux, un coin de la France parfois un peu en reste en termes d'activités musicales indés qu'elle essaye aujourd'hui d'activer avec force et professionnalisme. Pour en savoir plus c'est dans la suite !
Présente-toi brièvement à nos lecteurs "internautes" : comment t'appelles-tu, d'où viens-tu et que fais-tu dans la vie ?
Je m'appelle Claire Bernadet aka Beeho, je suis née dans les vignobles du Sud-Ouest et je vis à Bordeaux. Je tiens le blog heavy rock et métal The Heavy Chronicles depuis maintenant trois ans, et suis également chroniqueuse pour le webzine Room72.net. À côté de ça, je fais partie de l'orga des soirées stoner et psyché Make It Sabbathy à Bordeaux, aux côtés de Jimmy de Mars Red Sky et d'une poignée d'autres passionnés. Pour finir, je viens de monter ma boîte de relations presse, Purple Sage PR, ce qui fait désormais de moi une machine à bosser près de 60 heures par semaine... Mais je me régale !
On a tous un album, un mouvement musical, une personne qui a changé notre vision de la musique, quel est ton parcours personnel ?
Deux phases musicales en ce qui me concerne. Ado et jusqu'à la fac, j'étais une inconditionnelle du rap US et des musiques urbaines au sens large, une grosse fan du Wu Tang et de tout le mouvement west coast. J'achetais tous les magazines import qui sortaient, je faisais des nuits blanches pour enregistrer les clips sur VHS et les nouveautés à la radio, j'étais de tous les concerts... Passionnée donc, mais pas encore "impliquée". Au milieu des années 2000, je me suis progressivement mise au rock et au métal, parce que je n'arrivais plus à retrouver cette énergie sans compromis dans le rap. Le jour où je suis tombée sur la version live du "Fade To Black" de Metallica, j'ai signé mon aller sans retour pour le monde du heavy métal. C'est avec ce groupe que je me suis mise à fréquenter les forums musicaux, chose que je ne faisais pas avant. J'ai appréhendé pas mal de genres de métal et de rock par curiosité, et c'est justement par le biais de potes fans de Metallica que j'ai découvert plus en profondeur l'univers du stoner, du doom... Il ne m'a pas fallu longtemps pour tomber amoureuse du "Dopethrone" d'Electric Wizard et commencer la descente aux enfers. Depuis, mon coeur vibre pour tout ce qui est Heavy.
Ton implication dans la musique? Le moment où tu as franchi le pas? Celui où, si c'est le cas, cette activité est devenu ton métier ?
J'ai découvert assez tard les joies des communautés sur le web, et c'est à partir de là que j'ai vaguement commencé à écrire des reports de concerts. Mais c'était juste pour les copains, pour le partage. J'ai toujours adoré écrire, sans trop me poser de questions. Un jour, mon copain me dit "tout le monde se reconnait dans tes reports, pourquoi est-ce que tu n'ouvres pas un blog ?". Bingo. Mars 2010, j'ouvre un blog au nom très approximatif de Beeho's Purple Haze, et commence à pondre des chroniques, un peu au gré du vent. Un an plus tard, mon copain (qui évolue dans le milieu de la musique depuis toujours, de par son activité de producteur et compositeur) décide de monter un webzine sur Bordeaux, dans le but de créer un tremplin pour les acteurs de la musique locale et underground. J'avoue que le fait d'officier dans un cadre plus organisé et de faire partie d'une équipe a agi comme un révélateur : à ce moment précis, j'ai compris que le journalisme musical (aussi gonzo puisse-t-il être) était en train de devenir plus qu'un hobby. Dans la foulée, je donne un coup de frais à mon blog en le renommant The Heavy Chronicles et en lui offrant un nouveau site plus "pro". Je poste aussi plus régulièrement, et les labels commencent à me contacter pour des chroniques... The Heavy Chronicles a vraiment décollé à partir de là, mais je savais pertinemment que ce ne serait jamais une activité rentable. Je fais de la com tous les jours depuis deux ans, que ce soit pour mon site ou plus récemment avec les Make It Sabbathy, et la conjoncture étant ce qu'elle est (d'autant plus lorsqu'on vit en province), j'ai préféré devenir mon propre boss et bosser en collaboration avec des artistes dont j'apprécie le travail. RP et journaliste à la fois, c'est un peu comme voir des deux côtés du miroir d'Alice !
Les principales difficultés que tu as rencontrées ? Celles que tu rencontres encore ?
Si on parle des RP, je démarre donc je dois faire mes preuves et gagner la confiance de mes premiers clients, ainsi que des journalistes. En ce qui concerne le blogging, je ne parlerais pas d'une difficulté mais d'une frustration : celle de ne pas pouvoir chroniquer tout les projets que j'aimerais chroniquer. Je dois avoir des dizaines et des dizaines d'albums cool en attente, mais je suis incapable d'assimiler la musique de façon "industrielle", et régurgiter pour régurgiter, ça n'a pas d'intérêt. Je préfère faire une seule belle chronique par mois, que vingt chroniques insipides. Cependant, j'ai quand même beaucoup d'admiration pour des mecs comme JJ, qui gère le site The Obelisk, et pond des murs entiers de chroniques et de comptes-rendus de concerts tous les jours. J'aurais aimé être un peu plus "nerd" dans une autre vie...
Ton avis sur l'éthique du DIY ? Ta propre définition ?
Étant quelqu'un qui se pose peu de questions, je n'ai pas de grande théorie à ce sujet. Disons que mon ressenti m'amène à penser que le DIY est essentiel à la survie des musiques qu'on affectionne, c'est un peu l'oxygène vital à notre communauté. Si on veut un monde à notre image, alors il faut le façonner nous-même. En se serrant les coudes, ça va de soi...
Tes projets ? Comment vois-tu ton activité évoluer ? Tes souhaits ? Tes craintes ?
Comme je le disais en introduction, je viens de me lancer dans les relations presse en freelance. C'est ça qui va désormais payer les factures (je l'espère), donc je mets toute mon énergie là-dedans. Pour le moment, je bosse avec peu d'artistes, mais j'espère pouvoir grossir un peu leur nombre d'ici la fin de l'année prochaine. Pas pour faire joli sur le CV, mais pour le plaisir de promouvoir des groupes que j'aime. Mes craintes ? Mon côté workaholic me fait parfois flipper, et avec tout ce que le fait d'être entrepreneuse implique, il va vraiment falloir que je prenne sur moi pour garder un sas de temps libre pour respirer. En ce qui concerne The Heavy Chronicles, je ne m'inquiète pas trop, le blog tient un bon rythme de croisière. Enfin, pour les Make It Sabbathy, on est en train de préparer la programmation 2014, et il y a de très belles choses qui sont en train de se profiler. Pour l'instant, le concept fait pas mal d'adeptes à Bordeaux, j'espère vraiment qu'il va s'inscrire dans la durée, au même titre que les Stoned Gatherings à Paris.
Ton album ultime ? Le concert auquel tu penseras toujours ?
Je vais faire simple : Metallica "Ride The Lightning", parce qu'après tout, sans cet album je n'en serais jamais arrivée là. Pour ce qui est du concert, c'est hyper difficile. Je vis les concerts tellement intensément que j'ai énormément de bons souvenirs qui se bousculent dans mon esprit... La première fois que j'ai vu Down en live (à Barcelone en 2009) m'a vraiment transcendée et émue. Les avoir vus aux côtés de Corrosion Of Conformity, Eyehategod et Church Of Misery au Kristonfest 2011 a aussi été quelque chose de grand, de très grand. Sinon, en souvenir indécrottable, j'ai le concert de Red Fang et Black Tusk aux Stoned Gatherings à Paris au printemps 2012 : une chaleur à crever, des groupes et un public surmotivés, jamais retrouvé une ambiance aussi électrique depuis. Les Stoned Gatherings, c'est toujours quelque chose !
Ton instant musique de prédilection pour la ressentir au maximum ?
En live ! Et au premier rang, quoi qu'il en coûte ! En dehors du live, j'adore écouter de la musique dans le noir avec un casque sur les oreilles, juste avant de dormir.
Quel est ton rapport avec un instrument de musique ? Fascination, peur, frustration ?
Frustration. J'ai essayé d'apprendre à jouer de la guitare il y a quelques années, malheureusement je n'ai pas une super oreille. Concrètement, tout ce que j'essayais de jouer se rapprochait du "yaourt riffique", car j'entends une note sur deux. Pour ne rien gâcher à mon handicap, je souffre du syndrome du canal carpien, donc même si j'avais eu un minimum de talent, je n'aurais pas pu pratiquer de façon intensive. Mais j'adore chanter, alors je me rattrape là-dessus. Après tout, la voix est un instrument comme un autre, non ?
Parmi les nombreux styles de musique autour desquels nous gravitons, lequel t'es le plus cher et pourquoi ?
Difficile à dire, mon oreille évolue au sein de tellement de mouvances musicales différentes ! Disons que tant qu'il y a du groove et de la mélodie, tant que ça me touche, je prends. Sans considération de genre.
Es-tu capable d'écouter des choses totalement différentes ? Si oui des exemples pour tenter de nous faire peur ?
J'ai un peu annoncé la couleur tout à l'heure quand je parlais de rap US. J'adore toujours ça, j'écoute aussi beaucoup de R'n'B et de soul, toutes époques confondues. En ce moment, je me remets à écouter les classiques de la Motown, et toute la soul des années 70 (Bill Withers, Al Green, Marlena Shaw, les O'Jays...) De temps à autre, il m'arrive aussi d'avoir un "crush" sur un truc improbable : ça peut être de la house, de la salsa, de la dark pop minimale... Et puis j'écoute pas mal de trucs festifs "shake ton booty" comme Major Lazer ou Diplo.
Dans quoi mets-tu le plus d'argent ? Vinyles/CDs/Bandcamp, concerts, merchandising ?
Clairement les concerts. La plupart du temps je ne paye pas ma place car j'y vais pour faire des articles et des photos, mais comme ces concerts ont souvent lieu à Paris, Londres, etc... tout mon argent passe dans le voyage et les frais annexes que ça implique. De ce fait, plus on fera venir d'artistes cool à Bordeaux avec les Make It Sabbathy, moins j'aurai à me déplacer, et plus j'aurais de thunes pour acheter leurs disques !
As tu une "consommation" similaire dans d'autres formes d'art ?
La cuisine, c'est bien de l'art ? La cuisine, alors.
Tes parents écoutaient quoi quand tu étais enfant ?
Mes parents étant les personnes les plus ouvertes et éclectiques que je connaisse, je dirais que ça pouvait aller de Brassens à Miles Davis, en passant pas les Pogues et de sombres groupuscules de musique ethnique du fin fond de la Papouasie. J'ai tout de même eu droit à ma première cassette à l'âge de 7 ans avec "Dangerous" de Michael Jackson, puis à mon premier CD vers 9-10 ans avec "No Need To Argue" des Cranberries. Par la suite, j'ai fait la plus grande partie de mon éducation musicale par le biais de la radio, de MTV tard le soir, et des magazines musicaux... et bien plus tard, grâce à Internet. Enfants de la génération Y, je vous salue !
Le mot de la fin : il est à toi, dis ce que tu veux.
Merci à vous pour cet encart de libre expression (même si être l'interviewé reste un exercice auquel je ne me ferai jamais), ce concept de portraits est vraiment rafraichissant, je me suis régalée à lire les récits des autres interviewés ! Je vous souhaite une longue, looongue vie, Pelecanus. Vous êtes sans aucun doute l'un des webzines les plus cool et les plus vrais qui existe sur la toile francophone. Stay heavy !
Crédits photos : Gaël Mathieu
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