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Jakob + Kasan 24/04/2016 @ Le Klub , Paris

Portrait de Boris
Jakob + Kasan 24/04/2016 @ Le Klub , Paris

Et une nouvelle soirée estampillée "post" ma foi fort attendue ce dimanche 24 avril sous les caves voûtées du chaleureux Klub, en plein coeur du 1er arrondissement parisien, pour les quelques privilégiés - la salle souterraine affichant quasi-complet — venus découvrir les trois architectes sonores néo-zélandais de Jakob, en pleine tournée européenne.

Début des hostilités peu avant 21h, avec les sympathiques Leipzigois de Kasan, et leur "dark instrumental rockaux contours anguleux noyé dans un envoûtant mur de reverb. Leur musique, teintée d’une certaine austérité toute saxonne, commence par emporter l’adhésion de l’amateur de voyages sonores hallucinés, mais peine à retenir l’attention sur la durée d’un concert, faute en partie au manque de relief global des compositions des Allemands, mais aussi aux imprévisibles aléas du live - la bienveillance des plus acharnés d’entre nous n’ayant que difficilement résisté aux longues minutes de flottement occasionnées par la réparation DIY d’une sangle de guitare ayant lâché en pleine action… On retiendra tout de même une énergie communicative, une scénographie originale (les petites torches projetant des jets de lumière fixées aux manches des trois guitares) et des musiciens habités par leur musique, de vrais gars qui jouent avec leurs tripes, une bien plaisante mise en bouche avant la déflagration à venir…

Après un rapide changement de plateau, les trois musiciens de Jakob prennent place sur scène, sous les applaudissements nourris d’une partie de la foule déjà conquise par le prestige de ces discrets Océaniens ayant déjà écumé les scènes européennes en compagnie de ISIS et The Austerity Program, ou encore ouvert pour la tournée australienne de Tool en 2011.

Les images oniriques se succédant au rythme océanique des remous réverbérés.

Il est à peine 22h, les lumières s’éteignent… Déjà des nappes aériennes semblent jaillir du sol et nous envelopper de leurs complexes maillages d’échos infinis… Jeff Boyle enchaîne les montées de potards sur sa guitare, plongeant dès les premiers instants l’auditoire dans un quasi état hypnagogique, les images oniriques se succédant au rythme océanique des remous réverbérés… Soudain, un pattern de batterie bien connu des spectateurs tiré du magnum opus du groupe scinde la rêverie en deux, et ainsi prennent forme les premières notes de "Pneumonic". Tandis que Jason Johnston imprime son inflexible tempo, grondent les puissants accords de basse de Maurice Beckett, et les nuques de s’incliner en cadence.

À peine les derniers échos de guitare résonnent-ils encore dans l’air maintenant bien réchauffé du Klub, que le groupe enfonce le clou avec un magistral et habité "Blind Them With Science", enchaîné au non moins lysergique doublet "Magna Carta" et "Harmonia", tous trois issus de leur dernier album "Sines". Où l’on s’aperçoit à peine de l’absence des arrangements de cordes, tant les trois orfèvres parviennent à envelopper le champ sonore de leur aquatique muraille. Pourtant, cela n’empêche pas Beckett de nous gratifier de lapidaires salutations, voire de private jokes néo-zélandaises rendues incompréhensibles par le fort accent du musicien entre chaque morceau. L’ambiance reste bonne-enfant, un fan allant jusqu’à léchouiller lubriquement le manche de la basse qui passait trop près de son nez…

Le mercure monte, les applaudissements se font plus marqués, et le paroxysme du concert est certainement atteint lorsque s’élèvent les premières notes de "Malachite"

Le mercure monte, les applaudissements se font plus marqués, et le paroxysme du concert est certainement atteint lorsque s’élèvent les premières notes de "Malachite"… La foule se resserre encore, et comme les gars savent en garder sous le coude, ils nous livrent ensuite une interprétation sans faille de "Lonesome", puis, clou du spectacle, la sublime "Oran Mor", dont les montagnes russes émotionnelles imprimeront un souvenir impérissable dans les corps et les âmes des fans de "Solace", décidément fort bien représenté sur cette tournée. Nouvelle volée de bois vert avec la très toolienne "Ageena", début d’atterrissage en douceur sur un "Resolve" enchanteur, avant un final sous la bannière Russian Circles au son des tappings de guitare lancinants de "The Collar Sets"Well".

Merci Jakob pour cette soirée de grande classe, qui aura autant su rassurer les enthousiastes de la première heure que conquérir les coeurs des nouveaux venus dans l’inclassable univers des Néo-Zélandais. Un rappel utile que "Solace", "Subsets of Sets" et "Sine" demeurent des bijoux intemporels - encore qu’assez méconnus en France - témoins de ce que la scène post a su produire de plus élégant et racé ces quinze dernières années.

 

Crédit Photos : CSAOH / Andrey Kalinovsky

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