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Rétrospective - Nails : Intégrité et paternité

Portrait de Mathieu
Rétrospective - Nails : Intégrité et paternité

Aussi étrange que cela puisse paraitre, le Death metal fut considéré pendant un bref instant comme un genre capable d’être marketé par une major et vendu à un large public. En 1993, Sony signa un deal avec Earache Records pour distribuer aux Etats-Unis les disques du label. Pendant deux ans, Napalm Death, Morbid Angel et Godflesh furent distribués par le même label que Michael Jackson. Sans surprise, l’accord arriva vite à son terme et chacun retourna dans son coin. Pourtant, avec le succès de groupe comme Deafheaven, Mastodon, Ghost ou Nails, dans une moindre mesure, on en vient à se demander si le Metal extrême ne serait pas sur le point de revenir sur le devant de la scène. Une situation particulièrement étrange pour un groupe de grindcore et encore plus quand on considère son leader Todd Jones, un homme qui connait enfin le succès alors qu'il s'en est désinteressé.

Guitariste dans diverses formations Hardcore de Carry On à Terror, le musicien mit de côté son désir de vivre de la musique et fit ce que beaucoup décident de faire passé l’adolescence : fonder un groupe avec des potes sans se faire d’illusion. Ainsi, marié et père de deux enfants, le musicien semble voir Nails comme un moyen de s’exprimer artistiquement mais aucunement un projet viable commercialement ce qui permet ainsi au groupe de ne jouer que la musique qu’ils veulent sans trop se poser de questions. Ainsi, partagé entre ses rôles de père, de mari, d’employé dans une compagnie d’informatique et de guitariste et de chanteur dans son groupe, Todd Jones est l’exemple parfait du metalleux moderne. Il est réaliste, passionné mais raisonnable. Un parfait trio de qualité  pour un groupe dont les albums jouissent d’une consistance impressionnante autant en terme de qualité que d’agressivité.

 

Unsilent Death (2010)

On va à l’essentiel et on ne laisse rien debout.

Un peu moins de quatorze minute au compteur et une série de chansons fortes en blast où l’on reconnait immédiatement une identité et un objectif très clair : foutre le feu à tout ce qui bouge. L’un des leitmotivs des chansons de Nails est de parler de trahison et l’on sent bien chez les musiciens leur besoin d’exprimer une colère et une frustration bien réelles.  Unidimensionnels au possible, les riffs reflètent la rage et la passion des musiciens. On va à l’essentiel et on ne laisse rien debout.

 

Abandon all life (2013)

Un disque qui, s'il n’a rien de commun avec l’originalité du chef-d’œuvre de Converge, dégage une intensité et une authenticité identiques.

Trois ans plus tard, Nails revient avec dix-sept minutes de musique et des riffs un peu plus Death Metal. On reconnait l’influence de Morbid Angel sur le morceau titre mais on reste globalement dans les morceaux rapides et puissants. La production est cependant encore plus épaisse qu’auparavant afin de donner encore plus de muscles aux riffs. Comme s'ils en avaient besoin ! Malgré l’impulsivité qui se dégage de la musique, tout semble aussi millimétré et réfléchi pour obtenir l’impact maximum. Pas de perte de temps, on met tout à fond et on ne fait aucune concession. A l’instar de l’une de ses influences, Converge, Todd Jones démontre qu’il a bien compris les leçons de Jane Doe : Trace ta propre route, n’écoute personne et tu trouveras l’accomplissement personnel. Un disque qui, s'il n’a rien de commun avec l’originalité du chef-d’œuvre de Converge, dégage une intensité et une authenticité identiques.

 

You Will Never Be One of Us (2016)

Un peu plus Metal, toujours aussi fidèle à son objectif destructeur, Nails ne fléchit pas malgré une signature sur un plus gros label.

Après encore trois ans, Nails accouche de l’équivalent du Posers, leave the hall de Manowar si les posers devaient aussi aller se pendre et faire brûler l’arbre dont ils se sont servi. Même s'il est encore un peu trop tôt pour donner un avis complet sur le disque, le groupe expérimente un peu plus sur ce nouvel album et montre que l’on peut faire dans l’agressivité de différentes façons en l’espace d’une vingtaine de minutes. Cependant, que l’on ne se trompe pas, le groupe atteint enfin ce chiffre grâce à un morceau final de huit minutes, ce qui laisse dix chansons sur treize minutes. Pour le virage prog, vous repasserez. Un peu plus Metal, toujours aussi fidèle à son objectif destructeur, Nails ne fléchit pas malgré une signature sur un plus gros label (on passe de Southern Lord à Nuclear Blast) et continue de faire preuve d’intégrité. Longue vie à Nails et longue vie à Todd Jones. Qu’il ne revienne jamais sur son idée de vivre uniquement de sa musique et qu’il continue d’être un bon mari, un bon père, et un bon musicien.

Rétrospective - Nails : Intégrité et paternité
25/02/82, 1m80, à peine 60 kilos et élevé pour parcourir le macadam parisien de refuge en refuge jusqu'à son déménagement à Londres. Chroniqueur rock de 2004 à 2010 sur Eklektik-rock puis sur la fille du rock depuis 2010, bibliothécaire 2.0 depuis 2008, passionné de musique (metal, jazz, rap, electro …) et de comics. Ecrit aussi en anglais sur Delay and Distorsion (Chronique musicale).

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