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Rosetta + Restorations + Le Kraken + U.S.A. Out of Vietnam 02/03/12 @ Casa Del Popolo, Montréal

Portrait de William
Rosetta + Restorations + Le Kraken + U.S.A. Out of Vietnam 02/03/12 @ Casa Del Popolo, Montréal

Je ne m'en cacherai pas, la scène musicale entourant la région de Philadelphie occupe une grande place dans ma vie depuis quelques années. On y trouve des groupes fantastiques comme Rosetta, City Of Ships, Junius, Zodiak, East Of The Wall, Battlefield, Fight Amp et beaucoup plus. Cette scène s'est bâtie autour d'une maison de disques, Translation Loss Records, qui a su propulser les artistes de talent de sa scène locale avec brio. C'est exactement ce dont Montréal aurait besoin afin d'activer la sienne, vous ne croyez pas? Trêve de réflexion personnelle, deux groupes de Philadelphie avaient la tâche de nous faire trémousser les organes internes lors de la soirée du 2 mars dernier à la Casa Del Popolo. Crédits photos : François-Carl Duguay

En effet, les piliers du post-metal de Rosetta se sont armés de leur confrère de Restorations pour venir défendre leurs compositions. Leur passage était très attendu suite à l'annulation de dernière minute d'un concert prévu vers la fin 2011 en compagnie de l'excellente formation Braveyoung. Bien entendu, avant d'entendre les premières notes des deux groupes de l'extérieur nous avons eu droit à deux formations locales. La première et non la moindre : l'excellente formation de stoner/doom USA Out Of Vietnam. Ce groupe vous présente au chant/guitare un célèbre musicien et journaliste de la ville, ce qui met toujours les attentes très hautes à leur sujet. Est-ce que le résultat est renversant? Je n'irais pas jusqu'à dire cela, mais il faut tout de même admettre que leur son est terriblement lourd et précis. Le chant psychédélique vous met en transe et les répétitions massives à la guitare et à la basse crée une trame de fond parfaite pour se laisser planer. Malheureusement, la tête de l'ampli de basse a rendu l'âme après seulement une dizaine de minutes d'introduction à leur premier morceau. Ce fut la galère totale, les musiciens ont mis plus de 15 minutes à tout replacer et nous avons eu droit à un autre 10 minutes joué avec stress et rapidité à la suite de cet incident. Décidément, ce ne fut pas une bonne expérience pour les gens qui ne les avaient jamais vu auparavant. C'est dommage puisque le son dans la Casa Del Popolo était grandiose lors de leur prestation. Vous pourrez vous reprendre rapidement puisqu'ils seront présents lors du Pelecanus Fest 2012 qui aura lieu le 24 mars. Alors, c'est un rendez-vous pour tous les gens qui sont restés sur leur faim les concernant.

La suite était un rendez-vous attendu de tous, le fameux retour sur scène à quatre musiciens de la formation locale Le Kraken. Après une autre période de pause qui préparait l'ajout d'un second guitariste, le groupe était enfin prêt à faire un concert officiel sur les planches montréalaises. Quoi de mieux que de se faire offrir une place en première partie de Rosetta sur un plateau d'argent? Malheureusement, Le Kraken n'a pas eu la chance de sonner aussi bien que USA Out Of Vietnam et le résultat était un peu brouillon quoique terriblement percutant et massif. Ils ont cette capacité à créer des murs de son comme nul autre ne sait le faire en ville. Avec des rythmes de guitares encore moins mélodiques que par le passé, il faut être encore plus alerte lorsque Le Kraken performe… croyez-moi ça fait mal par où ça passe. Les nouvelles compositions sont d'une rigidité étonnante, c'est beaucoup plus malsain que ce à quoi nous avait habitué la formation. Bien sûr, il est toujours possible de reconnaître leur style via le jeu de guitare très propre au guitariste fondateur du groupe. Le seul point qui m'accroche avec le groupe actuellement est la méconnaissance des nouveaux morceaux. Il est difficile de véritablement prendre son pied lorsque ce qui se passe devant nous est mystérieux et inexploré. À première vue, les nouvelles compositions sont moins faciles à assimiler pour le public, les paroles restent moins en tête et les back vocals qui étaient indispensables sur Exalt sont maintenant pratiquement inexistantes. Malgré tout, ils sont capables de vous transporter dans un univers très personnel et émotif. J'ai simplement hâte de pouvoir m'approprier le nouveau matériel afin de vivre plus intensément les prestations. Chapeau au Kraken qui a décidé de jouer malgré quelques accrochages au niveau de l'organisation de la soirée, ce qui semble être chose courante dans la scène locale par les temps qui courent. D'ailleurs, le nouveau guitariste a fait une excellente performance et la réponse est désormais claire ; il faut deux guitares pour que Le Kraken sonne comme ce à quoi ils nous ont habitué.

Le moment que j'attendais le plus de la soirée était celui-ci, me retrouver devant un groupe dont je ne connais absolument rien. Ce sont de petits moments que j'adore, et la surprise fut de taille avec Restorations. Au premier contact, je croyais avoir affaire à un groupe emo-pop du début des années 2000. Leur look scolaire et "gars-de-tous-les-jours" me laissait perplexe comme une bonne partie de l'audience d'ailleurs. Je ne savais pas trop à quoi m'attendre, mais à ma grande surprise ce fut véritablement énergique et entraînant. Bien que les compositions étaient très propres, les guitaristes avaient des micros-riffs terriblement envoûtant et ils étaient joués avec une énergie au-delà de mes attentes. Je ne sais pas si vous avez déjà vécu ce genre d'expérience vous aussi, lorsque vous connaissez un groupe sur album et que le résultat en concert est complètement éclaté par rapport à ce que vous connaissiez? Certains groupes comme Gift From Enola, Twilight Sad, My Disco ou encore Les Savy Fav en sont le parfait exemple puisqu'ils livrent la marchandise à coups de pelle. Ce fut un peu le cas de Restorations qui a offert un pop-post-hardcore hyper clean, exécuté avec une énergie extrêmement positive et surprenante. Il n'y a rien de mieux que de voir un groupe qui adore ce qu'il fait, c'est la raison même de notre présence dans les salles de concerts. Nous y allons pour voir des groupes s'éclater et avoir de bons moments, alors il est triste de tomber sur des formations qui jouent de façon routinière et sans énergie. Ce ne fut absolument pas le cas de ce groupe que je recommande à tout le monde, ce n'est pas très intense ou méchant, mais bon dieu que ça fait du bien. Ce fut un 30 minutes beaucoup trop rapides à mon goût, je n'hésiterai pas à me représenter pour les voir à nouveau, ce qui semblait être la réaction globale de la foule qui a semblé réticente au départ et totalement envoûtée à la fin. Faites la découverte de Restorations si ce n'est pas encore fait, petit conseil d'ami.

Le clou du spectacle arrivait enfin, je ne m'en cacherai pas. Rosetta est l'un des groupes les plus importants de mon cheminement de vie. Vous savez, certaines situations difficiles de votre existence sont parfois associés à des compositions, c'est exactement ce qui arrive dans le cas de Rosetta et moi. À la base, il est facile d'en convenir, la musique du groupe est extrêmement haute en émotion et c'est ce qui m'a toujours attiré chez Rosetta. L'album Wake/Lift fut un élément phare de mes découvertes musicales des dernières années et il restera à jamais l'un de mes albums favoris même si je n'aime plus l'écouter. Lors de leur précédent passage en janvier 2011 avec Kylesa et Fight Amp, j'étais resté sur ma faim les concernant. Ils avaient joué à peine une trentaine de minutes et le choix des morceaux ne me renversa pas vraiment. Mes attentes étaient alors reportées pour ce concert qui leur offrait l'opportunité de se faire pardonner en jouant dans une plus petite salle et pour la première fois en tête d'affiche. Évidement, la setlist était axée sur le dernier album avec quatre titres issus de celui-ci ; Ayil, Renew, A Determinism Of Morality et Revolve. Je dois tout de suite afficher mon non-intérêt envers cet album, que je trouve inintéressant et ennuyeux. Heureusement, les reproductions de ces morceaux en concert sont d'une efficacité supérieure. Le moment fort fut malgré tout l'étonnant choix de Red In Tooth And Claw pour représenter l'album Wake/Lift. Ce fut un choix intéressant et qui apporta un vent d'émotion en moitié de spectacle. Nous avons eu une jolie surprise avec l'interprétation du morceaux paru sur le split avec Junius l'an dernier, TMA-3. Bien que moins originale que le matériel précédent de Rosetta, je dois avouer que cette chanson me plaît beaucoup. En résumé, nous avons eu une setlist étrange mais performée avec grande classe et dévotion.

Setlist

  • Ayil
  • Renew
  • Red In Tooth And Claw
  • TMA-3
  • A Determinism Of Morality
  • Revolve

Le post-metal dévastateur de Rosetta ne laissait pas la salle indifférente, le mur de son était terrible et l'énergie du chanteur et du guitariste était débordante. Autre point intéressant à remarquer est le jeu du batteur, c'est un fou. Il ne recommence jamais deux fois la même rythmique, c'est une variation et une progression constante de segments véritablement étranges. Je me souviens être resté 10 minutes, ébahi, à le regarder jouer. Ce sont des musiciens extrêmement intelligents, comment est-il possible qu'avec une seule guitare le résultat soit aussi massif? Ce secret sera sans doute enterré dans leur tombe, alors profitez-en pour ne pas rater leur passage dans votre ville. Ce fut une agréable soirée, lourde et libératrice, exactement le genre de concert qui nous donne l'énergie de continuer à faire notre petit bout de chemin. Sans avoir été grandiose, je peux dorénavant dire que Rosetta est capable de livrer la marchandise lorsque les conditions sont bonnes pour eux.

Chroniqueur montréalais pour Pelecanus depuis juin 2010 ayant participé à l'organisation de concerts ainsi qu'au défunt projet de webradio.

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