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At The Drive In + The Butcherettes + La Muerte 08/04/2016 @ Impetus 2016, Lausanne

Portrait de Lily Valentine
At The Drive In + The Butcherettes + La Muerte 08/04/2016 @ Impetus 2016, Lausanne

Attention la jolie poupée que voilà, ce soir en robe de tulle rouge, a de quoi faire passer les L7 et Beth Dito pour des animatrices de centre commercial. Certes il y a un style énergique, teinté de punk et de garage rock qui s’avère être un terrain de jeu propice aux prestations scéniques délurées mais Teresa Suarez alias Teri Gender Bender est surtout l’incarnation de la bête de scène rock’n’roll dans tout ce qu’elle a de plus excentrique, imprévisible et indécent (pour notre plus grand plaisir, bien sûr). Souvent retranchée derrière un look de baby doll trompeur, si la voix peut parfois rappeler PJ Harvey sur disque, l’attitude sur scène tient davantage d’une Nina Hagen.

La mexicaine compte parmi ses états de service des virées dans la fosse pour uriner (à chacune son style) et une panoplie de mimiques scéniques à scandaliser n’importe quelle association de bonnes moeurs. La jeune femme n’en demeure pas moins une mutli-instrumentaliste de génie à la palette aussi variée que réjouissante (passant du punk à la pop sautillante et au spoken word en un battement de cil) et une artiste engagée, à la verve caliente et sans détour faisant écho à Kathleen Hannah époque Bikini Kill. Le politiquement incorrect et le talent, on a ça dans le sang ou on ne l’a pas. Et ce soir, la très sage Helvétie va pouvoir juger sur pièce. Teri Gender ensorcele son monde dès le premier morceau. La voix assagie se fait criarde, la prestation s’envenime et véhicule une énergie communicatrice, finissant en danse (voir transe) collective au milieu de la fosse. La section basse-batterie ne faiblit pas et entretient le rythme frénétique de ce cirque endiablé sans fléchir jusqu’à son dernier souffle. En guise de première partie, une première claque bien sentie.

Le soin apporté à l’esthétique du groupe rappelle qu’il se définit toujours comme « le lien manquant entre Salvador Dali & the Stooges ».

L’autel au parfum de messe santeria sur un coin de scène pourrait faire écho aux racines mexicaines de The Butcherettes. Mais la filiation s’arrête là. Formé en 1983, la Muerte avait mis un point d’orgue en forme de poing dans la gueule (une caractéristique inhérente aux Bruxellois) à onze années d’existence avec l’album Raw, enregistrement live de leur concert d’adieu, sorti en 1994. A l’image d’un grand sportif, La Muerte avait raccroché au sommet de sa carrière et depuis aucune nouvelle, si ce n’est une apparaition à Dour en 1997 et un single en 2001, Black Dog 2000. Jusqu’à ce début mars 2015. Ressuscité, le groupe est de retour avec un line-up chevillé autour de ses deux pères fondateurs, Marc du Marais (chant) et DeeJ (guitare), seuls rescapés du combo d’origine. Néanmoins, le nouveau personnel en présence est prometteur (et déjà qualifié par certains comme le meilleur en date) : Tino de Martino (basse, Channel Zero), Michel Kirby (guitare, Length Of Time, Arkangel, Deviate) et Christian Z (batterie, Length Of Time). Bref, on a hâte : place au bruit ! DeeJ, cheveux blancs, blouson rouge et lunettes noires sonne le début des hostilités en replaquant les premiers accords. Exit les chapeaux de cow-boys et les bandanas léopards, Marc du Marais déboule dans un épais brouillard, sac de jute sur la tête. On a le frisson en repensant à un des psychopathes du film The Strangers (celui qui apparaît dans la cuisine juste derrière Liv Tyler, ça vous parle?). Le soin apporté à l’esthétique du groupe rappelle qu’il se définit toujours comme « le lien manquant entre Salvador Dali & the Stooges ». Au premier cri qui résonne, une certitude : la Muerte c’est un peu comme une mustang qu’on a laissé au garage sous une bâche. Une fois la clé dans le contact, le V8 se réveille, ronronne gentiment puis crache tout ce qu’il a dans les tripes à la première inflexion sur l’accélérateur, comme si les années n’avaient eu aucune prise sur sa mécanique. Le set est distillé comme un best of. Les morceaux s’enchaînent, tranchants, incisifs ; l’ambiance enfumée se veut tour à tour électrique et grisante, puis plus pesante et hypnotique comme pour amorcer sa descente. Marc du Marais s’impose en véritable fer de lance et captive son auditoire lausannois mais l’heure c’est l’heure, il est 22h et La Muerte quitte la scène sans rappel. Dommage on en aurait bien reprit une louche avant de pouvoir les retrouver sur un prochain album à venir courant 2016.

A en juger par les plaques d’immatriculation françaises foisonnant autour de la salle (certains n’ont pas hésité à se taper plus de 500km tout de même) et par les conversations échangées autour du bar en italien, anglais, néerlandais ; on s’est déplacé en masse et de loin pour assister à l’avant-dernière date de cette tournée européenne événement.

A en juger par les plaques d’immatriculation françaises foisonnant autour de la salle (certains n’ont pas hésité à se taper plus de 500km tout de même) et par les conversations échangées autour du bar en italien, anglais, néerlandais ; on s’est déplacé en masse et de loin pour assister à l’avant-dernière date de cette tournée européenne événement. Le retour des saigneurs de la scène post hardcore/noise/punk/post punk (chacun y mettra l’étiquette qui lui convient) est toute proche. Pour une grande majorité du public qui s’est fait couper l’herbe sous le pied après Relationship Of Command, c’est une première en live. L’excitation est donc à la mesure de l’attente (16 ans c’est long) mais pas le temps de se faire des nœuds au cerveau ou de disserter sur l’absence de Jim Ward (remplacé à la dernière minute par Keeley Davis, Engine Down/Denali/Sparta), les Texans arrivent et livrent une réponse en forme de déflagration tellurique avec Arcarsenal. Le message est incendiaire, la fosse se soulève aux premières envolées d’Omar Rodriguez Lopez et les bières virevoltent dans le pit. A l’évidence, recharger son godet avant d’aller se coller à la barrière n’est pas une bonne idée, comme le souligne Cédric ‘un poil bichette’ Bixler qui n’apprécie pas de se faire arroser. Le groupe poursuit sur les rails de leur album culte et reprend successivement Pattern Against User et Sleepwalk Capsules. Les adjectifs longtemps associés à ATDI : exalté, frénétique, convulsif, fulgurant … sont autant de caractéristiques de cette prestation largement centrée sur Relationship Of Command pour le bonheur de tous. L’urgence et la tension transpirent de chaque morceau (pour la plupart repris en cœur par le public), la débauche d’énergie et la maîtrise technique sont incarnées par le jeu impeccable de Paul Hinojos à la batterie. Comme pour rappeler toute l’étendue de leur talent, les Texans explorent quelques digressions mélodiques aux arrangements plus complexes à l’image de leur EP Vaya dont ils reprennent 300 Mhz, Metronome Arthrisis ou encore Proxima Centauri. Détour de nouveau avec Lopsided (extrait de In/Casino/Out , album sorti en 98 et préfigurant celui de leur consécration en 2001) avant de plonger vers l’entêtant Invalid Litter Deep suivi d’Enfilade dans une version rallongée où Omar Rodriguez-Lopez se laisse aller à quelques incartades. Véritables équilibristes, les gars d’ATDI manient toujours avec la même facilité déconcertante un mélange où s’entrechoquent son brut et sophistication, énergie punk et lyrisme inspiré, noirceur perlée de sueur et dynamique chauffée au tison. Les sauts de Sir Bixler sont plus rares, au profit de quelques détours vers sa tasse de verveine mais l’estocade est franche, l’affrontement sonique tant attendu au rendez-vous. Quarantine, Catacombs puis One Armed Scissor qui mettra un terme à ce set épidermique. Lumière dans la salle, le retour à la réalité est brutal d’autant plus qu’il n’y aura aucun rappel mais les sourires s’affichent sur tous les visages. « Trop fort. EncoooOooore ! » comme le résumera mon voisin trempé de sueur. To Be Continued...

Le groupe sera de retour sur le vieux continent fin juin-début juillet sur quelques dates de grands festivals européens (Roskilde, Werchter, ...).

Merci à l’équipe des Docks pour son accueil. Le management d’ATDI ayant choisi de limiter au dernier moment les accréditations photos, nous ne pouvons malheureusement pas illustrer cet article. 

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